Mélody Herman, Ambassadrice du Futur de Startup For Kids, se plonge pour son deuxième article dans la passionnante histoire de Marguerite Higgins, la première femme américaine reporter de guerre.
Marguerite Higgins est une journaliste américaine née le 3 septembre 1920 à Hong Kong.
Ses parents, Lawrence Higgins et Marguerite Goddard, se sont rencontrés alors que Lawrence, un Américain, servait comme pilote en France pendant la Première Guerre mondiale. Durant les cinq premières années de sa vie, Marguerite vit donc entre Hong Kong, où son père travaille, et la France, où elle rend visite à la famille de sa mère, avant de s’installer à Oakland, en Californie, en 1923.
Marguerite Higgins fut l’une des premières femmes correspondantes de guerre américaine. Elle a couvert les conflits majeurs de la moitié du siècle dernier comme la libération des camps de concentration de Buchenwald et Dachau, le procès de Nuremberg, le blocus de Berlin, la guerre de Corée ou la guerre du Vietnam, tout en se battant contre le sexisme omniprésent des rédactions des années 1940.
Un correspondant de guerre peut étudier les aspects militaires, politiques, géopolitiques, diplomatiques, économiques et humanitaires d’un conflit et travaille dans les zones de combat, intégré dans une des forces en présence ou plus à l’arrière. Ce qui en fait un métier dangereux mais très important.
Un début de carrière sous le signe de la guerre pour Higgins
Elle commence sa carrière de journaliste en écrivant pour The Daily Californian, après son entrée à l’Université de Berkeley. Puis, en 1941, elle réussit à intégrer la prestigieuse Université de Columbia, dont elle sort diplômée en journalisme.
Ensuite, lorsqu’elle entre au Herald Tribune, un journal appartenant aujourd’hui au New York Times, en 1942, le monde du journalisme est un monde d’hommes, où les femmes n’ont pas leur place dans les services étrangers et encore moins dans les reporters de guerre, puisque ce département est considéré comme l’un des plus prestigieux. Mais grâce à ses traits de caractère et au fait que les rédactions étaient en grande partie vidées de leurs journalistes masculins au début de la Seconde guerre mondiale pour des raisons évidentes, Higgins parvient à entrer au service étranger du Herald Tribune et à être envoyé en Europe en 1944, alors qu’elle n’est âgée que de vingt-quatre ans.
En 1945, elle couvre la libération des camps de concentration de Buchenwald et de Dachau, puis le procès de Nuremberg, où elle se fera remarquer pour son fort caractère et son endurance physique puis sera décorée du campaign ribbon, une récompense militaire, pour service rendu durant la libération des camps nazis. Elle reçoit également le prix de la meilleure correspondante étranger par le New York Newspaper Women’s Award.
Faire face aux conflits… et au sexisme de l’époque
En 1947, elle est nommée chef du Bureau de Berlin et suit le blocus de Berlin.
En 1950, elle est nommée chef du bureau du Tribune à Tokyo.
Bien que déjà largement reconnue, Marguerite Higgins se fait ainsi véritablement un nom en tant que grande reporter de guerre pendant la guerre de Corée. C’est l’une des premières reporters américaines sur place lorsque celle-ci éclate. En Corée, Higgins doit lutter contre les a priori et critiques dus à son sexe et à son physique. Le Général Walker, un homme de guerre célèbre pour ses points de vue ultra-conservateurs, interdit aux femmes de couvrir les combats. Mais Marguerite Higgins se bat pour assister aux événement et obtient son retour sur le terrain du Général MacArthur, un général américain et field marshal philippin. Ce qui lui permet de participer au débarquement d’Inchon le 15 septembre 1950, au côté des Marines américains.
Elle sera aussi nommée, par la suite, chef du Bureau de Moscou en 1955.
Higgins, une reporter reconnue mais critiquée
Les différents obstacles que Marguerite Higgins a dû affronter la mènent jusqu’au Prix Pulitzer, qu’elle remporte en 1951 ! C’est un prix d’excellence américain remis à des personnes, journaux, magazines, revues ou agences de presse dans le journalisme, la littérature et la composition musicale. Il est considéré parmi les plus prestigieux du monde et elle est la première femme à recevoir cette récompense dans la catégorie « reportage international ».
Cependant, durant son séjour au Vietnam en 1965, elle attrape la leishmaniose, une maladie tropicale transmise par un insecte, et est rapatriée aux États-Unis. Elle succombe malgré tout le 3 janvier 1966, à l’âge de 45 ans. En reconnaissance de ses services exceptionnels, elle est enterrée au cimetière national d’Arlington en Virginie.
Elle reçut beaucoup de critiques dus à son sexe et son physique, reçue de son vivant et après sa mort… En effet, les articles à sa mémoire font souvent référence à son physique et à son prétendu comportement de séductrice avec par exemple, un article du magazine Time qui dit que la reporter « utilisait ses cheveux blonds et ses yeux bleus pour obtenir des informations qu’elle voulait, stratagème qui ne manquait pas de faire enrager ses collègues masculins ».
Elle reste, néanmoins, l’une des femmes reporters les plus célèbres de l’histoire, ainsi qu’une figure féministe internationale bien que peu à peu oubliée (ou peu mise à l’honneur en France du moins).
Elle est donc pour moi une figure inspirante, du fait de son courage, de sa détermination, de son désir de changer les choses et de son acharnement à chercher la vérité malgré les obstacles, mais aussi du fait de sa passion pour l’écriture, qui fait écho à ma volonté de devenir journaliste, tout comme elle a pu l’être avant moi !
Retrouvez ici le premier article de Mélody !
Source de la photo : Carl Mydans, Girl war correspondent. The New York «Herald Tribune’s» Maggie Higgins is winning battle of the sexes on the Korean front. — Life. — New York: Time Inc., 2 октября 1950. — С. 51—60. — 136 с.