Mélody Herman, Ambassadrice du Futur de Startup For Kids, se plonge pour son troisième article dans la passionnante histoire de Vigdís Finnbogadóttir.
Très récemment, j’ai eu la chance de pouvoir voyager en Islande pour les vacances. C’est un pays très ancien quand on y pense, puisqu’il porte ce nom depuis 870, après que Floki, un des premiers Vikings à avoir colonisé l’île, l’ait surnommé « la terre de glace », Icelande en anglais. C’est pourquoi, après avoir pu admirer ses magnifiques et nombreux paysages, écouter son histoire et découvrir ses légendes et folklores, cela m’a donné envie de faire quelques petites recherches. J’ai ainsi pu déceler le parcours d’une femme inspirante, dont j’avais certes déjà entendu parler, mais pour laquelle je n’avais jamais pris le temps de me renseigner. J’ai nommé… Vigdís Finnbogadóttir.
Elle est la première femme présidente d’Islande mais aussi du monde ! Ainsi, Vigdís Finnbogadóttir naît le 15 avril 1930 à Reykjavik, la capitale de l’île, dans une famille aisée, avec un père ingénieur civil et une mère à la fois infirmière et présidente de l’Association des infirmières islandaises. Elle étudie les langues, la dramaturgie ainsi que la littérature française en passant par l’Université d’Islande, l’Université de Grenoble, l’Université de Copenhague mais aussi par la Sorbonne, à Paris. Elle est une fervente défenseure des langues et est d’ailleurs, avant toutes choses, professeure de français au lycée, avant d’enseigner la littérature du théâtre français à l’Université d’Islande. Avant de se lancer dans la politique, Vigdís a donc fait ses preuves dans le domaine académique en tant que professeure et directrice du Théâtre National d’Islande, poste qu’elle obtient en créant la première troupe de théâtre d’avant-garde d’Islande, Grima, qui eut beaucoup de succès.
Une journée qui a marqué l’Islande
Un jour, l’ONU décide que l’année 1975 sera dédiée aux femmes, c’est « l’Année Internationale de la Femme ». Une volonté d’émancipation plane sur le pays islandais. Alors, le 24 octobre 1975, les Islandaises se rassemblent pour prouver que la société ne peut pas tourner sans elles. Celles-ci touchaient un salaire près de 40 % inférieur à celui des hommes et étaient déterminées à changer les choses. Elles abandonnèrent leurs postes et ne firent rien chez elles, ne s’occupèrent pas de leurs enfants, ni des tâches ménagères, ni de la cuisine.
Cette grève pacifique, à laquelle 90 % des femmes du pays participent, paralyse l’île. Il n’y a plus ni téléphone ni journaux. De nombreuses industries, les théâtres, les écoles et les commerces sont fermés, les vols sont annulés et une manifestation est tenue à Reykjavik, réunissant des milliers d’entre elles, laissant les hommes se débrouiller seuls.
La grève dura jusqu’à minuit, jusqu’à ce que les typographes se remettent au travail pour sortir les journaux, moins longs que d’ordinaire et composés uniquement d’articles sur la grève. A noter que les organisateurs avaient pris le soin de désigner cette grève comme un « jour de congé », pour que les femmes ne soient pas licenciées pour leur désir de faire la grève, un mot jugé trop brutal, même si le but de cette journée était le même. Cette date sera utilisée pour d’autres manifestations féministes, même des années plus tard, servant de modèle et d’inspiration.
Entre doute et soutien, Vigdís, candidate improvisée
Cette journée a également eu des répercussions sur la présidentielle qui a suivie. En effet, en 1980, la volonté des Islandais d’élire une femme à la tête du pays est prononcée. Plusieurs noms circulent, dont celui de Vigdís Finnbogadóttir.
Elle refuse d’abord de se présenter, puis finit par accepter devant l’insistance de nombreuses personnes. On dit qu’une lettre touchante de la part de marins pêcheurs aurait fait pencher la balance. Ceux-ci reconnaissaient le travail accompli par les femmes à terre puisqu’ils étaient contraints de faire le même lorsqu’ils étaient en mer, et l’ont ainsi soutenue tout au long de sa campagne. Etant une femme, divorcée et mère célibataire d’un enfant, certains ont émis des doutes quant à sa capacité à diriger le pays. Elle riposta en disant qu’elle s’était bien débrouillée toute seule jusqu’à présent, qu’elle n »avait pas eu besoin d’un monsieur à ses côtés et qu’elle n’en avait toujours pas besoin.
Une entrée dans l’histoire… et un parcours engagé
C’est ainsi qu’en 1980, Vigdís Finnbogadóttir a inscrit son nom dans l’histoire en devenant la première femme à être élue démocratiquement présidente de l’Islande au suffrage universel. Sa victoire a envoyé un message puissant sur la capacité des femmes à occuper des postes à responsabilité à un niveau mondial. Elle a de plus été réélue à trois reprises, gouvernant pendant quatre mandats présidentiels consécutifs, jusqu’en 1996.
Pendant sa présidence, la question cruciale de l’égalité des sexes est mise en avant ainsi que l’importance des langues et de la culture. Après sa longue carrière présidentielle, Finnbogadóttir est restée engagée dans des initiatives culturelles et sociales. Elle a continué à promouvoir l’égalité des sexes, devenant une figure respectée aussi bien en Islande qu’à l’étranger, et est alors devenue une voix influente, plaidant pour la participation accrue des femmes dans tous les domaines de la société.
De plus, elle a été nommée ambassadrice de bonne volonté à l’UNESCO pour son engagement pour les langues et la culture. De nombreuses institutions universitaires et scientifiques dans le monde lui ont décerné le titre de docteur honoris causa, elle a reçu de nombreux prix et a été nommée membre d’honneur de plusieurs associations. Un prix international Vigdís, récompensant les personnes, organisations ou institutions qui ont mené des travaux novateurs en faveur des langues et des cultures avec une somme de 6 millions de couronnes islandaises, a été créé à son nom en 2020. Il est décerné par le gouvernement islandais chaque année.
Une femme inspirante devenue un symbole
Vigdís Finnbogadóttir est bien plus qu’une figure politique. Elle est devenue un symbole de l’Islande progressiste mais aussi de l’émancipation des femmes. Son héritage persiste dans la conscience collective de l’Islande et du monde, inspirant les générations futures à se battre pour l’égalité des sexes. Son héritage en tant que première femme élue présidente a inspiré des générations de femmes à s’engager en politique et à poursuivre des carrières prestigieuses. Pour preuve, la Première ministre islandaise, Katrin Jakobsdottir, pour qui elle a été « une grande inspiration », s’exclame : « Elle nous a ouvert la voie à toutes […]. J’ai grandi avec Vigdís comme présidente, et j’ai réalisé son impact quand elle a quitté le pouvoir et que ma nièce de six ans m’a demandé : « Est ce qu’un homme peut être président ? » » lors d’une interview à l’AFP.
Aujourd’hui, l’Islande est à la tête des classements internationaux en matière de parité, et Vigdís n’y est sûrement pas étrangère. Seulement, la parité n’a pas encore été atteinte, alors le combat continue. C’est pour cela que je trouve que cette femme est extraordinaire et inspirante !
Les Ambassadeurs.rices du Futur est un programme conçu pour les jeunes de 12 à 20 ans souhaitant s’impliquer et contribuer à la mission de Startup For Kids à nos côtés : aider le plus grand nombre de jeunes dans leur exploration du monde !
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Photos : Mélody Herman, lors de son voyage en Islande